Même type de question ou de mouvement sur et à côté d’un Carl ANDRE ou encore dans un accrochage éclaté de Blinky PALERMO et semblable sentiment de solitude ; pas la moindre réponse en vue.
Un jour que cette gymnastique m’amusait plus qu’elle ne me désespérait, j’ai dessiné au fusain une piste d’athlétisme de 50 mètres de long. Il s’agissait d’une forme d’autodérision où je donnais un sens trivial à la ligne ; certes ce n’était plus ma ligne mais au moins c’en était une. J’ai longtemps gardé les terrains de sport comme de possibles modèles ; sans passion ni aversion pour le sport, c’était idiot : ça m’intéressait.
Depuis de nouveau modèles sont apparus, restent toutefois quelques vestiges de poteaux de basket ball ou quelques lignes aux allures ludiques et surtout la même ambition ; faire cohabiter avec humour dimension analytique et poétique.
Le peintre fabrique plus ou moins de la ressemblance puisqu’il travaille devant une surface de projection en deux dimensions. Nommer un espace à trois dimensions comme le fait la sculpture appelle nécessairement à s’extraire de cet espace, ainsi le sculpteur élabore t’il de la différence. Bien évidemment ces définitions réductrices peuvent s’entrecroiser ou se contredire à l’infini. Surtout ces questions de médiums semblent caduques à l’heure de l’exposition comme format, elles ont ici pour intérêt de nommer une des raisons qui m’a fait glisser lentement de la peinture à la sculpture.
Une sculpture n’est ni plus ni moins qu’un objet qui cherche à tenir debout dans une double impuissance : 1ere impuissance par nature à ressembler à quoique ce soit, 2ème impuissance de l’époque où tenter de se problématiser comme médium voir pire comme forme, est une impasse annoncée. Faire une sculpture c’est persister dans la conscience de ces impuissances à vouloir faire bonne figure. Il n’y a d’ailleurs pas de sculpture sans figure.
Une ligne dans le monde… Lorsque Buster kEATON s’efforce d’apparaître perpendiculaire à la ligne d’horizon, chaque vallon est l’opportunité d’une drôle de figure oblique.
L’oblique est un outil récurrent pour Buster kEATON, une manière de lutter contre l’inévitable chute sur une pente trop raide ou par temps de vent trop violent, c’est aussi et surtout une manière de construire les images. Faire image de cet état d’équilibre entre la chute promise et la persistance à vouloir tenir debout me semble une manière possible de parler de la sculpture aujourd’hui